Chant égorge
Rendant hommage à un ami disparu

Un jour, un poète commença son hommage par :
« Ce fut une longue journée sans toi, mon ami,
Et je te dirai tout à ce propos quand je te verrai de nouveau. »
Cela rappelle cette fugace impression
De nausée existentielle
Que nous ressentons depuis ton départ.
Car vois-tu, mon cher fils,
Depuis que le Seigneur t’a rappelé à la maison,
« Le seul jour facile était hier. »
Il m’a fallu toute une vie pour te donner la vie,
Autant qu’il t’a fallu toute une vie pour t’offrir une seconde vie,
Celle d’un immortel qui vivra éternellement au sein de son art.
Mais il n’a fallu qu’un soir pour que tu perdes ta première vie.
Un soir,
Un simple soir,
Un simple soir comme celui-ci,
Un simple soir de la libération
Qui t’a libéré de ton enveloppe charnelle
Au moyen des mêmes outils
Qui ont jadis apporté la dite libération
À ton pays bien-aimé.
Ah ! si j’avais su que tu me serais arraché
À tout jamais dans la fleur de l’âge,
Je ne t’aurais pas laissé venir au monde.
Je t’aurais gardé le plus longtemps possible dans mon sein,
Afin que jamais le destin ne convoite tes lendemains.
Je n’étais pas encore rassasiée de ta présence
Que voilà la faucheuse me sert ton absence
Sur un plateau rouge de sang,
Sans sourciller,
Sans hésiter,
Sans froid aux yeux,
Sans […],
Voilà que la haine précipite tes jours vers l’au-delà
Dans le linceul du sommeil éternel,
Comme une souris qui tangue sans vie dans une eau verdâtre.
Alors que le jour clignait
Ce soir-là et que le ciel s’assombrissait,
Notre terre vit couler ton souffle
Comme l’eau d’un fleuve qui va à la mer,
Incapable de revenir en arrière vers sa source.
Je t’appelais « mon trésor », car tu étais ma raison de souffrir.
Je te chérissais, puisque tu étais ma raison de vivre. Pourtant…
Un soir pas comme les autres,
Un soir maudit,
Un soir macabre,
Un soir où tu rentrais, insouciant de ce que te réservait la nuit,
Plein d’entrain, comme une biche
Assoiffée devant un courant d’eau douce.
La faucheuse réservait une fin
Tragique à l’humain heureux que tu as été,
Quand la haine et son ombrage rôdaient sur ton chemin,
Afin de t’empêcher de voir le soleil se lever le lendemain.
Toute une vie pour t’avoir dans ma vie,
Pour te voir grandir,
Me réchauffer à la clarté de ton sourire.
Toute une vie pour bercer tes rêves et caresser tes peurs,
Mais juste un soir pour te perdre
À la faveur de la noirceur du néant.
Un soir a suffi à égorger ton sourire éclatant
Et faire de toi une pensée errante dans la nature,
Un souvenir grandeur nature.
Si jamais les sanglots de mon cœur
Atteignent l’autre rive où tu te trouves,
Fais-moi même un signe de vie.
Fais-moi un signe de rien.
Fais-moi un signe, afin que je sache
Que ma détresse est plus éloquente que mes mots.
Pour te rendre hommage, mon chéri,
Je t’ai appelé Kongolo, puisque tu étais ma force et ma joie.
Mais comment faire pour te voir allongé
Sans éclat ni souffle de vie, aujourd’hui,
Et demeurer joyeuse ?!
Tu laisses mon cœur dépourvu du souffle de vie
Et mon esprit noir de regrets.
Tu me laisses la langue endolorie
Par un mal plus grand que ma personne,
Rendant les mots lourds
À porter pour te dire au revoir.
Mais en attendant de te revoir dans la félicité,
Puisses-tu trouver un hommage mérité
Dans mes faibles mots, fruits de mon cœur meurtri,
De mon esprit désemparé
Que ton départ inopiné a flétri,
Et de mon âme de mère éplorée.
Sache que ton départ est une entorse à tous mes espoirs,
Lenfant noir.
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